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Non aux bouteilles à prix cassés

Publié le: 23-03-2021

Viticulture La FNSEA et les JA33 ont montré leur indignation, samedi 20 mars, sur le parking du Lidl de Libourne.

« Moi, à ce prix-là, j’en ai pris plusieurs caisses… en plus il est bon ! » explique une cliente qui profite de la promotion. Un réflexe de consommateur somme toute logique, même si derrière ce prix bas, c’est toute une filière qui est mise à mal… un mal que les consommateurs ont parfois des difficultés à bien mesurer. Pourtant, le calcul est simple : pour que le prix soit rémunérateur pour le viticulteur, le plancher est de 3 euros la bouteille… à 1, 69 euros, on est loin du compte. C’est ce qu’ont montré, samedi 20 mars, sur le parking de Lidl, la FNSEA et les Jeunes agriculteurs (JA) de la Gironde. Avec un slogan : « Le mépris des bonnes choses ». Et les manifestants, venus nombreux, d’expliquer aux clients qu’« avec une bouteille d’AOC bordeaux à moins de deux euros, vous êtes sûrs que le producteur ne couvre pas ses coûts de production. Sûrs que des emplois vont disparaître en masse. Sûrs que les investissements nécessaires à la transition écologique ne peuvent plus être financés. 

Prix cassés = vignes arrachées
Les banderoles installées entre deux rangées d’arbres sont claires : les prix cassés sont synonymes de vignes arrachées. Un viticulteur en a d’ailleurs apporté deux remorques entières pour montrer les dégâts que les étiquettes en dessous du prix de revient occasionnent. Un prix d’appel pour la grande surface : l’expression de la détresse que traverse la filière viticole girondine depuis de nombreux mois. Jean Samuel Eynard, président de la FNSEA de la Gironde – et par ailleurs viticulteur à Bourg – dénonçait ce prix, même s’il peut comprendre que certains confrères soient poussés à vendre à bas prix quand les dettes s’accumulent et que les banques ne suivent plus. Mais il a du mal à admettre que certains négociants jouent à ce jeu dangereux. « La viticulture c’est 55 000 emplois directs dans le département. » Il souligne la crise qui dure : avec les taxes Trump (aujourd’hui suspendues pour quatre mois en vu de négociations entre les États-Unis et l’Europe), le Brexit, la Covid-19 qui a stoppé les débouchés à l’export et ceux de la restauration…
Et ce prix d’appel qui vient alors que les viticulteurs se reprenaient à espérer : « avec la réouverture des restaurants et la reprise de l’activité touristique annoncées pour dans quelques semaines. Des débouchés qui ne sont pas négligeables en Gironde. »
Vincent Bougès, le président des JA33 – et viticulteur dans le Médoc- rappelle que « si on rapporte ce prix au tonneau, cela donne 700 euros. Alors qu’on sait qu’en dessous de 1100 voire 1200 euros, ce n’est pas viable pour le viticulteur. »
Au-delà de ce prix bas, les deux représentants syndicaux s’inquiètent de ce qu’il signifie à plus long terme sur l’image des vins de Bordeaux. Une AOC qui se vend au même prix qu’un vin sans indication géographique, cela brouille les repères. Un coup bas dont les bordeaux n’ont pas vraiment besoin.
Cette fois-ci les syndicats s’en sont pris à la grande distribution, qui dévalorise le travail des producteurs, mais ils ont promis de ne pas rester sans réaction face aux négociants qui entrent également dans ce jeu déplorable.